Projet universitaire, texte 3
(Projet universitaire session hiver 2016
En 2016, j’ai reçu une demande de collaboration pour un projet universitaire. En fait, il s’agissait de donner une liste de sujets à des étudiants afin que ceux-ci rédigent un billet, une chronique, pour alimenter mon blogue. Quelle belle idée! Avec grand plaisir, j’ai donc de mon côté cherché des difficultés linguistiques, des erreurs souvent vues, qui pourraient faire l’objet d’une étude, et j’ai rédigé pour les étudiants un petit texte pour présenter chaque cas. Je remercie sincèrement Anne Fonteneau, professeure à l’Université Laval, d’avoir pensé à moi pour ce travail de fin de session présenté dans le cadre du cours Synthèse de documents, du programme de Rédaction professionnelle.)
« Pour une durée de… » : locution qui a la vie dure ?
par Marie-Philippe Morneau
Utilisée par les uns, par les autres évitée, l’expression pour une durée de…, redondante selon certains, ne fait pas l’unanimité en pratique. Si les ouvrages de référence donnent sensiblement la même définition de durée, soit un « espace de temps » qui s’écoule entre le début et la fin d’une chose, ils n’en ont toutefois pas la même interprétation.
Certains ouvrages, dont la BDL, Le Petit Robert et Le Multi, ne relèvent pas de pléonasme dans l’expression. Respectivement, ils écrivent : « une durée de [soixante] minutes », « pour une durée de quinze jours » et « la durée du film est de deux heures ». Ils semblent considérer que la durée, laps de temps observé entre des limites définies, n’est que l’expression de la notion générale de temporalité. L’usage d’un complément exprimant la durée ne leur paraît donc pas redondant.
Or Antidote ne reconnaît pas cette utilisation du nom durée avec une indication chiffrée de temps. Le correcteur soulève d’emblée la formule comme pléonastique, affirmant que le nombre d’heures implique nécessairement l’idée de durée. Le Dictionnaire de l’Académie française ne semble pas non plus entériner cette expression. Les deux références acceptent plutôt que le nom durée soit suivi d’un adjectif qualificatif. Tant le Dictionnaire qu’Antidote diront d’une durée qu’elle est indéterminée, journalière ou hebdomadaire, par exemple, mais ils n’y adjoindront pas un complément du nom introduit par la préposition « de ».
Les ouvrages de référence sont toutefois unanimes quant à l’utilisation du verbe intransitif « durer » avec un complément adverbial exprimant le temps dans l’acception « avoir une durée de ». Ainsi, Le Petit Robert écrit : « le spectacle dure deux heures », Le Multi : « [l]e film dure trois heures » et le Dictionnaire de l’Académie française : « [l]a séance dura deux heures ».
Interprétant différemment le nom durée, les ouvrages divergent nécessairement quant à l’emploi de la locution. Revient donc au rédacteur le choix d’utiliser cette expression – selon qu’il y relève ou non un pléonasme – ou de lui préférer la construction verbale, admise par tous les ouvrages.